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 Sommaire du numéro 1 de COLOMBUS

 

 

 

 

s’informer
s’évader : la grotte de Clamouse
rencontrer : Malika Dif
écouter une parole de femme
comprendre - dossier : La Violence. Qu’en penser ? Que faire ?
  • Jeunes et acteurs éducatifs témoignent
  • Combattre la violence à sa source, de Habib AFFES
  • " La violence des jeunes révèle d’abord leur souffrance ", de Miloud Ismaïli .....
  • Les religions et les guerres, Entretien avec Mamoun Mobayad
  • " L’histoire islamique dans son ensemble est marquée par le respect de l’Autre. "
  • Entretien avec l’historien Imad Addin Khalil
  • L’Islam religion de la paix, de Cheikh Mohammad al-Ghazali
  • Une attitude devant la violence
  • Comment l’Islam régule la violence ?, de Yahya Michot
  • Que faire face à la violence ?
  • Le remède contre le terrorisme et la violence, du Conseil de Jurisprudence Islamique
  • Éduquer à la citoyenneté, un moyen de combattre la violence en profondeur
  • Entretien avec Philippe Meirieu
  • Comment réagir face à une personne violente, de Samia Karim
  • Pour en savoir plus
lire une nouvelle : À quand votre retour... Ô noble sentiments ! ?
prier
méditer le Coran : Sourate 18 : La Caverne, versets 9-21
méditer la parole du Prophète
découvrir : La Médecine dans la civilisation islamique
réfléchir : Les Musulmans en Europe. Quelle priorité ?
Les jeunes s’interrogent...Réponses pratiques
Cuisiner : L’huile d’olive... produit d’un arbre béni.

  

 Quelques articles du numéro 1 de COLOMBUS

 

 

Combattre la violence à sa source
 
Habib AFFES
Directeur de la Rédaction
 
  • La violence est l’une des caractéristiques de notre société moderne
 
La violence est une pénible constante de l’histoire. Elle fait partie intégrante du monde qui est le notre. Vous le constatez partout et tous les jours. Dès l’école, les enfants échangent des injures (et en profèrent parfois contre les professeurs). Comme les autres, vous avez dû subir ou entendre parler de menaces, de coups, de racket d’argent ou de vêtements... Dans les moyens de transport, vous voyez que l’insécurité se vit au quotidien, pour les usagers comme pour le personnel. Que ce soit dans la rue ou chez soi, plus personne (notamment parmi les plus faibles) n’est à l’abri de vol ou de brutalités gratuites, quand ce n’est pas de viol ou de séquestration. D’une façon générale, nous vivons avec la violence. Celle du pouvoir, du monde qui va trop vite, de certains mots et de certaines images, et de certains sons.
Il y a des mouvements d’humeur violents. Leurs conditions de vie rendent certains enfants violents. Du coup, il y a des parents violents. Le racisme est une autre forme de violence. La drogue et l’alcool sont des moyens violents de calmer l’humiliation. La peur engendre aussi la violence. L’injustice est une violence insupportable. Les armes amplifient la violence et derrières les armes, il y a la violence de l’argent qui est une des plus grandes drogues actuelles. Dans la majorité des sociétés, il y a les gens qui ont beaucoup, immensément, et puis de plus en plus, d’autres survivent ! Cette attraction de l’argent est terrible, au niveau des jeunes notamment !
 
    • Pourquoi ce climat de violence ?
 
Premièrement : parce que l’homme est naturellement violent
Nous sommes violents naturellement. Le Coran met en scène des crimes et des actes violents. Il nous parle d’un meurtre, celui de Hâbîl (Abel) par son frère Qâbîl (Caïn), comme si le récit coranique nous annonçait qu’un des problèmes majeurs qu’il va traiter est celui de la violence humaine. Déjà avec Caïn et Abel, le Coran nous donne une des clefs d’interprétation de la violence : " l’envie et la jalousie ". La violence écrase l’homme, elle compromet " le vivre ensemble ", voilà un constat que le Coran assume entièrement. Celui-ci nous oblige à la regarder en face et nous illustre l’hostilité de l’homme pour l’homme. Mais le Coran ne s’arrête pas là, il nous montre comment surmonter la violence qui nous habite et la transformer.
Cette violence que nous avons en nous n’est pas mauvaise du tout. Elle nous permet de nous affronter, de réagir, de nous défendre, d’avoir des rapports avec les autres. Dans une certaine mesure, pour vivre, il faut s’opposer aux autres. Mais il faut aussi apprendre à vivre avec eux. Maîtriser la violence ne consiste pas à la nier, mais à la réordonner. Si elle est bien orientée, alors elle peut se transformer en énergie pour lutter contre le mal et promouvoir le bien. Il est donc essentiel d’enseigner aux jeunes à maîtriser leur tendance naturelle à la violence et cet apprentissage est un acte éducatif essentiel.
 
Deuxièmement : parce que la société est violente
La société est violente à divers titres. Les principaux victimes de la violence se recrutent surtout parmi les membres les plus fragiles, les plus vulnérables de la société, en partie d’ailleurs parce qu’ils sont moins aptes à se défendre, à se protéger : violence sociétale qui les enfonce dans leurs difficultés. Il faut associer ces difficultés de vie au chômage, à l’absence d’espoir et de projets. Il est courant d’entendre dire que cette impossibilité d’accéder aux richesses modernes est l’un des facteurs de la révolte des banlieues mais vous savez que la fauche, la triche et la brutalité sévissent aussi chez les jeunes des beaux quartiers...
 
Troisièmement : parce qu’on laisse souvent monter la violence
Regardez le modèle sociétal prédominant — et largement médiatisé — qui présente la violence comme moyen de régler les conflits. Dans la vie sociale et plus généralement, la violence est le langage des faibles, de ceux qui sont opprimés, exclus et n’ont pas d’autres voies pour se faire entendre. Mais plus souvent elle est le langage des forts, de ceux qui oppressent, qui veulent asseoir leur pouvoir, maintenir leurs privilèges. Sur un autre plan, la télévision nous gave, entre autres, de coup de feu et de rodéos automobiles. Les jeux vidéos sont souvent des jeux de guerre (ou plutôt de massacre).
 
Quatrièmement : parce que la violence est un langage
C’est le langage des gens qui ne savent pas s’exprimer normalement, qui ne se sentent pas reconnus, qui sont déboussolés. C’est pour avoir l’air d’exister qu’ils gueulent ou agressent. La violence de beaucoup de jeunes d’aujourd’hui traduit leurs frustrations, notamment celle d’avoir été souvent mal aimés, d’avoir été nourris et non élevés par des parents dépassés par leur responsabilité. Ils ont souvent été cassés très tôt par la désunion de leur famille et, dans le cas de foyers recomposés, s’y sont vite sentis de trop. Certains jeunes de migrants se forgent une identité à travers leurs actes de violence et expriment leur désarroi devant un avenir incertain.
 
    • Comment lutter contre cette violence ?
 
Vous avez compris que les causes de la violence sont multiples. Vous en déduirez avec moi qu’il faut chercher à agir sur plusieurs fronts. Il convient, en premier lieu, de secourir les victimes, de les soustraire à la maltraitance, de les protéger, de dénoncer la violence dont elles souffrent : le rappel de la loi est ici essentiel, qui dit aux fauteurs de violence : " Vous n’avez pas le droit ! ". Il faut aussi expliquer ce qu’est la violence et pourquoi elle se déchaîne ; responsabiliser les citoyens en leur montrant que nous sommes tous concernés par ce problème ; tenter de canaliser la violence des jeunes ; les aider à transférer leur agressivité ; savoir dire non, savoir punir ; manier à la fois la carotte et le bâton, c’est-à-dire prévenir et dissuader les actes de violence, oser les réprimer, même ceux qui paraissent bénins, mais simultanément et par-dessus tout, porter l’effort sur l’éducation. C’est la condition première de la prévention. Je suis d’accord avec ceux qui pensent que désarmer la violence qui habite notre société passe tout d’abord par un renforcement systématique des actions à portée éducative : éducation à la citoyenneté, éducation aux valeurs universelles, lutte contre la peur de l’autre et renforcement des rencontres d’échanges et de communication. Car on le sait, l’être humain ne peut se développer que grâce et en rapport à autrui.
Privé d’échanges affectifs et sociaux, il ne peut accéder à sa pleine humanité, ni même jeter les bases de sa propre identité. Ces échanges, ne constituent pas seulement une nécessité du développement de la personne ; ils sont en même temps indispensables au "vivre ensemble" et à l’élaboration d’un avenir meilleur pour tous. La violence doit être combattue à sa source. La paix ne peut naître que du cœur de l’homme.
 
 

  
Les religions et les guerres
 
Entretien avec Mamoun Mobayad
Psychanalyste,
Professeur d’université à Belfast en Irlande du Nord.
 
 
Colombus : Est-ce que les religions sont les causes premières des guerres ?
 
Mamoun Mobayad : Depuis l’assassinat du premier fils d’Adam par son frère jusqu’à nos jours, l’humanité n’a cessé de passer par une multitude de guerres et de conflits aux cours desquels d’innombrables victimes sont tombées. Je citerai parmi ces guerres : les conflits des empires romain, perse et prussien, la première guerre mondiale, les conquêtes des colonialismes européens en Asie et en Afrique, la guerre du Vietnam, la guerre Irak-Iran, la guerre du Koweït, la guerre de Bosnie, les conflits en Somalie et en Irlande du Nord etc.
Je ne pense pas qu’une seule de ces guerres n’ait été déclenchée pour des motifs religieux. Certes la religion peut être utilisée parfois pour identifier tel individu ou tel pays. A partir de là, quand une guerre éclate entre deux pays de religions différentes l’on penserait rapidement qu’il s’agit d’un conflit religieux. Or, c’est faux, même si les dirigeants des deux pays en question vont sans doute exploiter les sentiments d’appartenance religieuse pour haranguer les foules et les impliquer dans des conflits d’intérêts.
Depuis toujours, les gens se sont entretués pour divers motifs, tel l’or, les épices, le pétrole et les diverses ressources minières ou les marchés… Est-ce que le conflit en Afrique du sud était un conflit religieux ? Ne s’agissait-il pas plutôt de l’oppression d’une minorité à l’encontre d’une majorité dans le pays !
Et la guerre en Palestine, oppose-t-elle l’islam au judaïsme ? Ou s’agit-il de l’agression des colonisateurs occupants contre les autochtones du pays ? Et les conflits dans cette partie de l’Irlande du nord, sont-ils vraiment des guerres entre Catholiques et Protestants ? Ou il est bien question d’une agression d’une partie du peuple contre une autre.
Je connais beaucoup de Catholiques et de Protestants qui entretiennent des relations très amicales et très chaleureuses entre eux.
Plutôt que de situer le débat dans une dichotomie : " Pour " ou " contre " la religion, je préfère instaurer un dialogue commun où chacun de nous essaiera d’appréhender le vrai péril qui menace notre humanité par ces conflits et ces guerres.
Je pense que les conflits et les guerres trouvent leur origine dans les caractères négatifs des gens, tel la convoitise, la gourmandise, l’avarice, l’égoïsme, la mégalomanie et le désir de domination, la jalousie, la rancune, la vendetta et notamment l’aveuglement par les intérêts personnels.
Tous ces caractères négatifs poussent l’homme à agresser son prochain, à menacer sa paix et sa liberté et à spolier ses droits et ses intérêts. Tel est le mobile primaire qui expliquerait les guerres. Je dois ajouter, en toute franchise, qu’il y a une crise morale mondiale. Nous vivons dans un monde injuste, non équitable. Un monde aux normes et aux positions ambivalentes. Oui, nous sommes en face d’une crise morale, même aux plus hauts niveaux !
La raison des conflits et des guerres entre les gens c’est bien l’oppression qui résulte de leurs caractères négatifs, et qu’il se produit quotidiennement des crimes, des tueries, des viols et des pillages innombrables. Or toutes ces pratiques déviantes doivent être réparées et réformées, et il n’y a pas plus fort que la religion pour " polir " et éduquer les comportements des gens.
Les religions ont tenté par le passé d’éduquer le comportement de l’homme et de l’humaniser. Et c’est seulement quand il s’est soustrait aux principes moraux de sa religion que l’homme a pu semer carnages et corruptions sur terre. Les points noirs dans l’histoire de l’humanité ne représentent pas l’histoire des religions et ne sauraient être confondus avec. Au contraire, ils reflètent l’éloignement de l’homme de ces religions et de leurs préceptes moraux.
Malgré tout ce pourrissement dans le monde, qui oserait nier que ce monde aurait pu être pire que ce qu’il est si ce n’est l’apport de ce qui restait comme foi, religion et morale ? Le problème ne se situe plus désormais dans le foisonnement de la foi et du religieux mais plutôt dans leur raréfaction et le manque de leurs pratiques.
 
Colombus : Les médias associent souvent Islam, violence et terrorisme. Qu’en pensez-vous ?
 
Mamoun Mobayad : Bien que l’Islam soit la deuxième religion du monde, et que le quart des habitants de ce monde appartiennent à cette religion, l’image de l’Islam en Occident demeure déformée et négative. On associe facilement Islam, violence et terrorisme.
Et l’on n’évoque souvent l’Islam que pendant les conflits comme la guerre du Golfe. À ce moment les gens en Occident s’interrogent : C’est quoi l’Islam ? Et qui sont les Musulmans ?
L’Islam a interdit de tuer une âme humaine par respect à cet être humain que le Créateur a honoré.
Le plus grand pays musulman est bien l’Indonésie, cette contrée lointaine en Extrême Orient qui n’a pas connu un seul combattant musulman. L’Islam lui étant parvenu à travers les honnêtes gens simples et modestes parmi les commerçants qui ont visité ce pays. Malgré son image souvent altérée et négative et malgré l’absence d’efforts soutenus pour sa diffusion, l’Islam demeure toujours une religion à propagation rapide. Cette acceptation de l’Islam s’explique essentiellement par son indulgence et sa libéralité décrétée dans le Coran : " Nul contrainte dans la religion. " L’individu peut être ainsi contraint à changer ses vêtements, mais concernant ses idées, sa foi et sa religion, il n’y a pas de contrainte.
L’islam incite ses adeptes à privilégier toujours la voie pacifique pour régler les conflits et les différends. " Et s’ils penchent vers la paix, incline-toi vers celle-ci (toi aussi) ". Le Prophète (sur lui la paix !) n’a jamais dirigé un combat qu’il a lui-même déclenché ; toutes ses batailles étaient des ripostes aux agressions de ses ennemis.
L’Islam a interdit de tuer une âme humaine par respect à cet être humain que le Créateur a honoré. Il considérera même que " quiconque tuerait une personne non coupable d’un meurtre ou d’une corruption sur terre, c’est comme s’il avait tué tous les hommes "
(Coran, 5/32).
L’Islam n’est pas pour autant une idée abstraite ni une cité idéale imaginaire. C’est tout un mode de vie et une religion réaliste pour les gens. Il prévoit que l’existence n’est pas exempte de certains méfaits résistants à toute solution pacifique et qu’il faudrait forcément arrêter. Ainsi s’il n’y aucune issue à un problème sans le recours à la force, l’Islam autorise à ce moment-là l’inéluctable combat que l’homme réprouve par nature :
" Le combat vous a été prescrit alors qu’il vous est désagréable. Or, il se peut que vous ayez de l’aversion pour une chose alors qu’elle vous est un bien. Et il se peut que vous aimiez une chose alors qu’elle vous est mauvaise. C’est Dieu qui sait, alors que vous ne savez pas "
(Coran, 2/216).
L’Islam a par ailleurs interdit le combat sauf dans deux cas, que le bon sens ainsi que les règlements et les législations universels approuvent.
 
    • 1. La légitime défense :
" Autorisation a été donnée à ceux qui sont attaqués (de se défendre) parce que vraiment ils sont lésés ; et Dieu est certes capable de les secourir.
Ceux qui ont été expulsés de leurs demeures contre toute justice, simplement parce qu’ils disaient : Dieu est notre Seigneur [référence à la liberté religieuse]. Si Dieu ne repoussait pas les gens, les uns par les autres, les ermitages seraient démolis, ainsi que les églises, les synagogues et les mosquées où le nom de Dieu est beaucoup invoqué. Dieu est assurément Fort et Puissant " (Coran, 22/39-40).
"Combattez dans le sentier de Dieu ceux qui vous combattent, et ne transgressez pas. Certes, Dieu n’aime pas les transgresseurs. " (Coran, 2/190) " Et si vous punissez, infligez (à l’agresseur) une punition égale au tort qu’il vous a fait. Et si vous endurez… cela est certes meilleur pour les endurants " (Coran, 16/126).
 
    • 2. La défense des opprimés et des persécutés.
" Et qu’avez-vous à ne pas combattre dans le sentier de Dieu, et pour la cause des faibles : hommes, femmes et enfants qui disent : Seigneur ! Fais-nous sortir de cette cité dont les gens sont injustes, et assigne-nous de Ta part un allié, et assigne-nous de Ta part un secoureur. " (Coran, 4/75). Telle est la mission de l’Islam pour les musulmans.
Celui qui défend la religion peut paraître justifier les guerres. Par conséquent il passera pour quelqu’un qui suscite plus de conflits et d’épreuves. En revanche celui qui se permet d’attaquer la religion sous prétexte qu’elle attire les conflits aura l’air de quelqu’un qui milite pour l’arrêt des conflits et passera pour un ambassadeur de la " paix ". Et ce qui induit encore plus les gens dans la duperie, c’est de voir ces faux chantres de la paix affublés de titres d’"humaniste" ou de "pacifiste" .
Il est vrai que je suis en train de défendre la religion. Mais en même temps et avec la même détermination je prêche pour l’arrêt des agressions et des exactions, et pour la levée de toute injustice. Je prêche pour la paix au même titre que mon camarade " humaniste ". Notre position est la même au sujet de la guerre et de la paix, mais nous nous différencions dans nos attitudes face à la religion.
 
 
 
L’Islam, religion de la paix
 
Cheikh Mohammad al-Ghazali
 
S’il y a une religion qui requiert la violence pour imposer ses préceptes aux gens ce ne sera sûrement pas l’Islam. Et s’il y a un dogme qui profite de sa suprématie matérielle ou sa puissance militaire pour dicter ses principes et les propager dans le monde, ce ne sera sans doute pas l’Islam. Car l’islam est une religion fondée sur la raison et la " fitra " (nature originelle de l’homme) et le cœur humain y est naturellement prédisposé. L’unicité ne nécessite pas d’appareil répressif pour que les gens en soient convaincus… Les pratiques culturelles sereines et faciles, la moralité pure, et les principes justes et sublimes qui régissent la vie des gens sont autant de valeurs qui n’exigent qu’une prédication douce et indulgente qui privilégie le dialogue et la persuasion.
Il arrive sans doute que des idées ou des dogmes que la raison récuse ou que le bon sens et la " fitra " rejettent, aient besoin de tel ou tel moyen coercitif pour se propager. Mais l’islam n’a nullement besoin d’user de violence. L’Islam a besoin de gens qui l’écoutent, de gens qui le comprennent et de gens purs, sans arrières pensés ni passions qui aveuglent leur conscience et leurs cœurs. Si ces conditions sont réunies, l’Islam n’aura plus besoin de violence.
Nous rappelons d’ailleurs que tous les messages divins qui ont été révélés sur terre n’avaient jamais recouru à la violence pour faire régner la servitude et l’unicité de Dieu dans cet univers. Depuis le premier grand message de Noé (sur lui la paix !), la contrainte a été écartée des moyens de diffusion de la religion et de prêche pour faire adopter de plein gré les principes divins aux gens. À ce propos, Dieu dit dans le
Coran : " Il (Noé) dit : Ô mon peuple ! Que vous en semble ? Si je suis armé d’une preuve venue de mon Seigneur, et que Celui-ci m’a doté d’une miséricorde, et que vous y restiez aveugles, irions-nous vous les imposer contre votre volonté ? " (Coran, 11/28).
Cette question prononcée par Noé sera retransmise de génération en génération à travers les siècles et les âges, jusqu’à ce qu’elle parvint au sceau des messagers. Ainsi Dieu dit à son prophète Mouhammad (sur lui la paix !) dans la sourate de Jonas : " Si ton Seigneur l’avait voulu, tous ceux qui sont sur la terre auraient cru. Est-ce à toi de contraindre les gens à devenir croyants " (Coran, 10/99).
Ainsi la religion ne s’est propagée que grâce à des prédicateurs doués d’une raison saine et féconde et de cœurs purs et non pervertis. Tout cela était favorisé par un climat exempt de toute forme d’obstacles tel les tyrans et les injustes. Il n’y a qu’à méditer les versets de prêche qui ont bien précisé le rôle et la vocation du messager, pour retrouver justement cet aspect. Dieu dit à son prophète Mouhammad (sur lui la paix) : " Rappelle donc ! Et par la grâce de ton Seigneur tu n’es ni un devin ni un possédé " (Coran, 52/29).
Il lui dit aussi " Nous savons mieux ce qu’ils disent. Tu n’as pas pour mission d’exercer sur eux une contrainte. Rappelle donc, par le Coran celui qui craint Ma menace " (Coran, 50/45).
Il lui dit aussi : " Eh bien, rappelle ! Tu n’es qu’un rappeleur, et tu n’es pas un dominateur sur eux. Sauf celui qui tourne le dos et ne croit pas, alors Dieu le châtiera du plus grand châtiment " (Coran, 88/21-24). C’est seulement dans ce verset qu’il y a une restriction matérialisée par le terme "Illâ", littéralement " sauf ". Les linguistes arabes interprètent cette exception comme une restriction en vue d’une reprise d’un énoncé nouveau. Par conséquent elle n’a pas valeur d’une exception mais d’une opposition équivalant à la conjonction "Mais"… La suite logique du verset serait ainsi : Mais " Celui qui tourne le dos et ne croit pas, alors Dieu le châtiera du plus grand châtiment. " Dieu dit par ailleurs : " Certes, il nous est parvenu des preuves évidentes, de la part de votre Seigneur. Donc quiconque voit clair, c’est en sa faveur ; et quiconque reste aveugle, c’est à son détriment, car je ne suis nullement chargé de votre sauvegarde" (Coran, 6/104). Il dit aussi : " Et dis : " La vérité n’émane que de votre Seigneur. Que croit celui qui veut, et que dénie celui qui veut " (Coran, 18/29). Il dit également : " S’ils te démentent, tu n’as qu’à dire : A moi mes œuvres, à vous les vôtres. Vous n’êtes pas solidaires de ce que je fais, ni moi de ce que vous faites " (Coran, 10/41).
Tous ces versets ont été révélés pendant la période mecquoise durant laquelle les musulmans se familiarisaient progressivement avec le code déontologique de la prédication.
Nous réitérons donc que l’Islam a besoin de gens qui comprennent bien ce qu’ils disent et qui sachent le présenter de la manière la plus judicieuse et la plus douce. Il a aussi besoin de gens aux cœurs purs et saints ainsi que d’une ambiance dépourvue de tyrans et d’injustes qui viennent s’interposer à la voix de la vérité.
 
 

 
Éduquer à la citoyenneté,
un moyen de combattre la violence en profondeur
 
Entretien avec Philippe Meirieu
Professeur en sciences de l’éducation, Directeur de l’Institut des sciences et pratiques d’éducation et de formation de l’université Lyon II. Acteur engagé des évolutions de l’institution scolaire, animateur de réseaux pédagogiques, Philippe Meirieu milite pour une école où savoirs et expériences sont au service d’une plus grande liberté.
 
Colombus : Comment instaurer à l’école un climat d’expression, de délibération, de médiation des conflits qui fonde l’éducabilité, qui résiste à la loi du plus fort, aux petits rakets autant qu’aux paroles qui meurtrissent ou à une autorité qui écrase ?
 
Philippe Meirieu : L’école doit, effectivement, être un lieu où la loi du plus fort est suspendue et où l’on apprend à délibérer à l’abri de toutes les formes de pression. Mais, bien évidemment, pour parvenir à cela, il ne suffit pas de décréter l’abolition de la violence ou de mettre en place un système de sanctions et d’exclusions : l’objectif de l’école n’est pas de chasser artificiellement la violence de ses murs pour devenir "un havre de paix dans un monde de brutes". L’objectif de l’école est de permettre aux personnes d’intégrer la loi fondatrice du refus de la violence ; c’est de former les citoyens d’un État pacifié et démocratique. Pour y parvenir l’école doit, tout d’abord, introduire des médiations et favoriser l’activité collective des élèves : quand il s’agit de réaliser un montage électrique avec deux piles, des fils et des ampoules, celui qui a raison n’est ni celui qui crie le plus fort, ni celui qui intimide ses camarades ; c’est celui qui réussit à comprendre "comment ça marche" et fait en sorte que les ampoules s’allument. De même, quand il s’agit d’exprimer le mieux possible des sentiments ou d’effectuer un calcul, le plus "fort" n’est pas le plus "puissant"… À l’école, la médiation des savoirs, en ce qu’ils résistent à la puissance des affects et des rapports de force, favorise la construction d’une interaction sociale respectueuse de chacun.
Mais, pour aller vraiment dans ce sens, il faut que l’effort de chacun soit soutenu par la réflexion collective et la mise en place d’institutions où l’on puisse apprendre les enjeux d’une communication démocratique : c’est pourquoi il est si important que, dès les plus petites classes, l’on puisse définir un domaine sur lequel les élèves peuvent apprendre à débattre sereinement, à prendre des décisions et à en suivre l’exécution… Car ce qui caractérise un citoyen c’est qu’il obéit à la loi qu’il fait lui-même à travers les instances démocratiques : " L’obéissance à la loi qu’on s’est soi-même prescrite est liberté ", disait Rousseau. Certes, les élèves ne peuvent pas faire toutes les lois (sinon, c’est qu’ils seraient déjà adultes), mais ils peuvent, à l’intérieur d’un domaine défini par les adultes et en fonction de leur âge, contribuer à élaborer les règles du "vivre et travailler ensemble". Et c’est ainsi que, progressivement, s’installera ce climat favorable à l’expression collective et à la formation de la liberté.
Encore faut-il, bien sûr, - mais cela devrait aller sans dire – que les adultes eux-mêmes respectent les lois qu’ils imposent aux enfants et qu’ils ne se contentent pas de sanctionner les écarts à la norme : il faut qu’ils représentent eux-mêmes des modèles plausibles de citoyens solidaires…
 
Colombus : Pensez-vous qu’une éducation à la citoyenneté pourrait être un moyen efficace pour faire face à la violence des jeunes ?
 
Philippe Meirieu : Il n’y a probablement pas d’autre moyen de combattre la violence en profondeur que d’éduquer à la citoyenneté : la citoyenneté, en effet, c’est la capacité, comme dans le mythe des Chevaliers de la table ronde de "poser sa lance" à l’entrée et de participer à une collectivité qui délibère. Le citoyen est celui qui sait surseoir à ses impulsions pour accepter de réfléchir au bien fondé de ses intentions et de ses projets ; c’est celui qui n’est pas systématiquement dans le passage à l’acte. Le citoyen, c’est celui qui accepte, sans renoncer à la poursuite légitime de ses intérêts individuels, de les subordonner à l’intérêt collectif. Le citoyen, c’est celui qui accepte d’entendre la voix du "bien commun" et pas seulement celle de sa propre jouissance du moment. En ce sens, le citoyen, c’est un "sujet contre la violence", un sujet jamais complètement constitué, toujours à réinstituer et qui suppose une volonté que seule l’éducation peut permettre d’acquérir.

 

 

 

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